TEXTE 7: psy
Assise en face d'elle, souriant nerveusement, tripotant mon foulard, je regardais à côté, n'osant pas soutenir son regard pour ne pas qu'elle puisse lire dans le mien. Stressée, mon visage se tient en rouge en moins de temps qu'il ne lui a fallu pour me demander comment j'allais. Je lui répondis que je me portais bien, ce qui n'étais pas tout à fait un mensonge car à ce moment précis, je n'allais pas mal. Mais me regardant fixement, elle me fit plier et je lui avouai une fois de plus que je n'étais pas sous le meilleur jour. Cherchant ensuite de ce qu'on pourrait bien parler pendant cette séance, je sortis les dessins fais durant la semaine, me laissant le temps d'y réfléchir pendant qu'elle les observait. Pas un de ces dessins n'étaient gaies, tous fais d'une même couleur, le noir, et représentant pour la majorité des jeunes femmes dépressives aux yeux charbonneux. Mon alter-égo; car dessinées à mon image, c'est-à dire les émotions qu'elles représentent et qui me traversaient au moment où je les ai imprimées sur du papier. Ma psychologue me fit une des remarques similaires à celles de son registre pour commenter mes dessins: on ne peut voir les yeux de mes personnages. Ceux-ci sont soit clos, soit dissimulés derrière une mèche de cheveux.
Car mes dessins, aussi expressifs qu'ils peuvent l'être, trahissent suffisamment mes états d'âme. Je ne peux leur faire ouvrir les yeux, comme je ne peux regarder ma psy.
Ayant épuiser le sujet des dessins, j'abordai les rêves que je fis ces dernières nuits. Rêves étranges où se mêlent peurs et angoisses.
Je lui narrai les évènements de la semaine, avec leur lots de tristesse; elle me répondit, comme à chaque fois, par une réponse évasive que je connaissais déjà.
Parlant de douleurs du passé, je me mis presque à pleurer à plusieurs reprises, m'en empêchant par la gêne qu'elle m'occasionnerait. Avez-vous déjà pleurer devant un psy ? moi une fois seulement. Il n'y a rien de plus froid que ceci. Le psy ne fait que vous regarder, du haut de son fauteuil, pendant que vous, la tête baissée ou avachi sur le bureau, enfoui dans vos bras, vous vous sentez plus seul que jamais. Certes le psy a réussi à vous faire pleurer par je ne sais quel discours abordant un souvenir plus ou moins précis de votre enfance ou autre, et à un mot ,un déclic s'est produit, sans raison, et vous vous mettez à pleurer, ou vous vous retenez comme moi. Mais à ce moment là, il ne fait rien pour vous remettre d'aplomb. Il vous observe seulement, comme si vous étiez un rat de laboratoire. Comme s'il n'éprouvait pas la moindre compassion. Il ne cherche pas même à parler. Il attend que cela passe. Et ce moment m'est redouté car qui voudrait qu'on l'attende finir de sangloter ? Pas grand monde. Du moins ceux qui s'en rendent compte ou qui ressentent la même chose.
La séance se passe plus souvent différemment. En général, je ne raconte que quelques nouvelles sans intérêt, n'osant pas aborder l'affaire qui me taraude. Me censurant quand je tente de parler de choses sérieuses. Je repars alors comme je suis venue, la boule au ventre, et frustrée de n'avoir rien pu dire une fois de plus.
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